Les marchés publics : une aventure « Koh-Lantesque »

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« A la fin, il n’en restera qu’un » Denis Brogniard (Koh Lanta)

L’épreuve des courriers est l’étape charnière. Tout peut basculer ! A cet instant, l’aventure s’arrête. Le candidat a les nerfs à vif. Et la défaite sera amère, s’il se fait coiffer au poteau. Une élimination qui sera difficile à vivre d’autant plus si elle est incomprise. « Pourquoi être aussi corrompu ! »1 crieront certains (relire "L’AFA et PNF : un guide en commun sur les enquêtes internes anticorruption").
 

Candidats et acheteurs : mis à l’épreuve

La décision, au lieu de mettre un terme à la participation, peut conduire le candidat évincé qui a faim à transmettre le flambeau à la justice… et ainsi raviver la flamme de l’emporter… ou d’empocher une indemnité (relire "Calcul de l’indemnité du candidat irrégulièrement évincé"). Peu importe son classement (relire "Offre jugée irrégulière à tort : le candidat est bien lésé, quel que soit son classement"). Il peut être tenté de jouer sur tous les tableaux dès lors qu’il en maîtrise les règles (relire "Saisine d’un TA incompétent : le référé précontractuel menacé"). Mais parfois la défaite est cruelle (relire "Perdre un marché à cause d’un retard de 29 secondes !").
 
Dans le jeu de la passation d’un marché public, il est préférable pour un acheteur d’éviter ces situations. Il ne suffit pas de clamer que « la sentence est irrévocable »2 afin que la procédure se poursuive en toute quiétude (lire "Absence de transmission des caractéristiques et avantages de l’offre retenue : annulation de la procédure"). Il faut faire preuve de pédagogie lors de l’élimination (relire "Nice : un guide bleu pour accompagner les entreprises").
Or, il s’avère que le code de la commande publique ne serait pas toujours de bons conseils. « Ah ! »3 Même si la règlementation contraint plus ou moins le pouvoir adjudicateur à être transparent sur ses choix, il doit se montrer fin stratège. Comme le dirait le philosophe Denis (Diderot) : « Je puis tout pardonner aux hommes, excepté l'injustice, l'ingratitude et l'inhumanité ».

Il est essentiel que l’acheteur canalise à la fois le conflit à court terme et préserve la relation dans la durée avec ces aventuriers éliminés de la commande publique afin qu'ils soient motivés pour postuler à une prochaine compétition. Tout en respectant le secret des affaires des autres participants (relire "L’art de manier le secret des affaires"). La lettre de rejet ne doit pas s’apparenter à une bouteille jetée à la mer, avec l’espoir que le candidat qui la lira n’exprimera pas sa colère devant les tribunaux.
Il est vivement conseillé que l’acheteur donne un coup de collier dans la rédaction des motifs d'éviction et dans l’accompagnement des soumissionnaires déchus. « Y a pas de fatigue qui soit ! »4. Ces actions, bien qu’elles n’immunisent pas d’un recours, réduisent le risque d'un déluge de contentieux, et de devoir sortir les rames afin d'éviter que la consultation prenne l'eau (lire "En dire trop ou pas assez : la lettre de rejet un piège pour l’acheteur public ?"). 
 

Opter pour la bonne stratégie


Les candidats sont tenus d’avoir toutes les capacités requises pour se lancer dans cette aventure : « Pour être un aventurier, c’est comme le lait : faut pas être demi-écrémé, faut être entier »5 (relire "Groupement comportant un candidat ne possédant pas les qualifications pour exercer une activité règlementée"). Les opérateurs peu fiables peuvent tout aussi bien être écartés (relire "Black-lister les fournisseurs peu fiables : une pratique licite"). Les participants doivent être sérieux.

Durant une passation, il y a des alliances acceptables (relire "Des huissiers regroupés pour répondre à un appel d’offres, pas pour exécuter les prestations"). Et d'autres qui ne le sont pas. Des ententes peuvent ainsi se former (relire "Entente anticoncurrentielle : le Cartel du lino écartelé... et passé au cutter de l'AMF"), et des coups de poignards peuvent être donnés (relire " Quand l’attributaire conteste l’attribution de l’accord-cadre").

S'agissant des objectifs à atteindre, c'est le parcours du combattant... ils sont de plus en plus nombreux, ce qui complexifie l'exercice ; dernier en date : lutter contre les subventions étrangères (relire "Entre incompréhensions et inquiétudes : la DAJ tente de rassurer"). De quoi donner des sueurs froides. Le malaise, parfois, n'est pas loin (relire " L’achat public en « burn out » : entre assimilation et nouveauté de la règlementation").

Du côté de la collectivité, avoir un puit de science dans sa tribu est donc fort utile... mais celle-ci doit être vigilante quant aux relations qu'il entretient avec les participants (relire : Une consultation annulée à cause des liens de l’AMO avec l’attributaire).
 

Une fin devant le conseil


L’acheteur n’est pas seul sur une île déserte (relire "Une grande confrérie des acheteurs est-elle en train de voir (enfin) le jour ?"). Attribuer un marché public, c’est jouer en équipe. Bien que parfois l’un dise « rouge », l’autre « jaune »… élus, services achat et services prescripteurs avancent sous la même bannière : ils ont un besoin à concrétiser (relire "Le besoin défini dans le marché prime sur toute autre considération"). Et les plus élémentaires sont actuellement difficiles à satisfaire (relire "Energies : des impacts conséquents sur la commande publique"). C'est la jungle pour trouver du bois de récupération par exemple (relire "Un lot réemploi pour réhabiliter du Grand T(héâtre) de Nantes"). 

A la réunification, un moment tant redouté qu’attendu de la procédure, il y a tout un protocole à suivre en commission d’appel d’offres pour désigner le vainqueur (lire "Le B.A -BA de l’achat – La commission d'appel d'offres (CAO)"). Pour la régie, cela se déroule devant le conseil d’administration (relire "Le conseil d’administration d’une régie doit être au fait de tous les marchés"). Mais attention ! La stratégie pour départager les candidats ne serait pas toujours efficace et efficiente (relire " L’arbitraire se cache dans la méthode de notation des offres des soumissionnaires").

Malgré toutes ses péripéties, « à la fin, il n’en restera qu’un »6 ; seul le soumissionnaire ayant remis l’offre économiquement la plus avantageuse remportera le totem. 


Retrouvez les Grands gagnants quelques mois après leur sacre : "La vie après les Trophées de la commande publique (2/3) : ce qui a changé dans la vie des Lauréats"


1. Moundir (Koh Lanta)
2. Denis Brogniard (Koh Lanta)
3
Denis Brogniard (Koh Lanta)
4. Sara (Koh Lanta)
5. Moundir (Koh Lanta)
6. Denis Brogniard (Koh Lanta)