Edito 582

  • 18/03/2016
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Plus belle la commande publique, saison 3, épisode 4.

Hôtel de région de Septicémie Septentrionale, bureau de la direction de la commande publique, 6ème étage. « Non, mais vous vous rendez compte ! Les élus ont le choix entre l’Aupiomanie, la Nouvelle Géodésie ou alors Les Hauts d’Argutie comme nom de baptême de notre nouvelle grande région. Rien que de prononcer ces vocables épouvantables, ça me donne des palpitations anévrismales. C’est bien simple, je n’ai plus de tumescence pénienne nocturne depuis déjà une semaine, preuve ô combien tangible de mon désarroi », se lamente Hervé Legain, la voix brisée par l’émotion. « Moi de toute façon, quel que soit le nom tartuffesque retenu, ça me défrise d’être obligé de faire équipe avec les décervelés post-apocalyptiques de Transuranie Maritime. Vous avez jeté un œil à leurs CCTP ? Même les manuscrits de la Mer Morte sont plus modernes », se gausse Ray Ferret, meneur de la grève contre la réforme territoriale en 2014 (pour ceux qui auraient perdu le fil ou qui n’arrivent pas à suivre, se reporter à l’édito 507). « T’es trop négatif. La mutualisation, ça a aussi du bon. Si nos collègues transuraniens ont déjà fait le travail, ça nous simplifiera la vie, comme le fait l’AMUE pour les universités (lire notre article). Je pense surtout que tout ce cirque va nous retomber sur les bras, avec un marché attribué, comme par hasard, à une filiale de l’agence de communication qui a aidé notre président bien-aimé à se faire réélire. Y aura le logo à refaire, et sa déclinaison sur le papier et les enveloppes à en-tête, les magazines de la méga-région, l’affichage, les panneaux routiers… On fera un marché global, en arguant qu’on n’est pas capable d’assurer nous-mêmes le pilotage et la coordination de toutes les opérations. C’est passé comme une lettre à la poste devant un tribunal administratif (lire notre article). En plus, comme on nous promet une réforme du délit de favoritisme… (lire notre info) », commente, aigre-doux, Enrico Trétence. « Vous n’avez rien de mieux à faire que de jacasser sur des fariboles », coupe brutalement Marie-Lou Verture-Desplis, en train de lire l’analyse d’Alain Ménéménis sur le couple diabolique avocat/code des marchés (lire la chronique) et celle de l’avocat Guillaume Gauch sur les nouvelles conditions de passation des concessions (lire notre article). « Je vous signale que le décret, dans les parapheurs des ministres (lire notre info), va bientôt sortir. Ça promet, parce qu’Alain Lambert vient de lui tailler un costard, façon Savile Row. L’ancien sénateur n’y va pas de main morte : le droit de la commande publique est abscons et dangereux ! (lire notre invité du jeudi). Ses ex-collègues au Palais du Luxembourg ont amendé l'ordonnance  du 23 juillet et menacent de déposer un texte de loi si le gouvernement n'inscrit pas le projet de loi de ratification à l'ordre du jour (lire notre info) ». Nom de nom, c’est déjà la fin de cet édito à la fois choronymique et corrosif. A la semaine prochaine, peut-être.

Jean-Marc Binot