Après les annonces concernant la réforme du système de retraites, je peux facilement, au débotté, vous croquer le portrait de l’acheteur 3.0. Comme l’une des hypothèses étudiées pour le calcul de la pension est le compte notionnel (montant des cotisations divisé par le nombre théorique d’années de vie restantes sur cette chic planète à partir de la date envisagée de fin d’activité), je vous parie que le professionnel (masculin ou féminin) arrivera au bureau assisté d’un déambulateur aux roulettes grippées et gémissantes, perclus de rhumatismes, équipé d’un dentier dernier cri et de lunettes à double foyer. Et la saisie laborieuse d’un rapport d’analyse des offres d’un marché de 120 lots pour le praticien valétudinaire, à la mémoire passoire pantelante,  relèguera l’exploit des pontonniers du général Eblé à la Bérézina au rayon des parties de plaisir. Un éclair de lucidité permettra au Mathusalem de l'achat de se souvenir qu’il ne faut pas retenir « l’absence de proximité » du siège des soumissionnaires comme élément défavorable d’appréciation (lire notre article) et qu’il (ou elle) avait acheté la solution innovante d’une start up pour éviter de se perdre à son prochain rendez-vous à l’hôpital (lire notre article). Vu le tableau digne d’un Otto Dix, à mon humble avis, la seule solution, c’est que la passation des marchés - avec son cortège de migraines à répétition et le risque pénal  - soit reconnue au titre de la pénibilité. Parce que franchement,  vouloir comprendre si une convention d’aménagement est un contrat de mandat (lire notre info), chercher à savoir s’il faut, avant la notification du décompte général, inscrire le montant prélevé auprès du garant à première demande du titulaire, correspondant au coût des travaux nécessaires à la levée des réserves (lire notre article) ou tenter d’insérer des critères RSE malgré la censure des tribunaux (lire notre invité du jeudi), ça peut vous rendre vieux avant l’âge. Bon allez, je vous laisse, la calculette entre en ébullition, je fais le décompte de mes points. A la semaine prochaine,  peut-être.

Jean-Marc Binot