Achat socio-responsable : Strasbourg lance une charte et un réseau

  • 04/11/2010
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Adeptes des clauses sociales depuis 1994, la ville et la communauté urbaine de Strasbourg ont décidé de fédérer les énergies des donneurs d’ordre du bassin d’emploi en créant un réseau local des acheteurs responsables, dont la charte (téléchargeable) a déjà été signée par une quinzaine de donneurs d’ordre.

Le 28 octobre, la ville et la communauté urbaine de Strasbourg ont réuni une quinzaine de donneurs d’ordre du bassin d’emploi de la capitale alsacienne. Au menu : la signature d’une charte des acheteurs responsables et la constitution d’un réseau. L’agenda n’est pas fortuit puisqu’en novembre débute le mois de l’économie sociale et solidaire. Parmi ceux qui ont accepté de parapher le document, outre les deux collectivités précitées, on retrouve 5 communes, 2 organismes d’habitat, mais aussi le port autonome de Strasbourg, la compagnie des transports strasbourgeois, la SEM locale, la caisse d’allocations familiales du Bas-Rhin. Une demi-douzaine, dont la SNCF, le CHU, l’université, ont promis de rejoindre le club. En signant le document (1), les acheteurs s’engagent à examiner pour chaque marché les possibilités de clause d’insertion, à intégrer « systématiquement » la réflexion responsable dans « tout acte d’achat », et à participer à « l’élaboration d’une stratégie territoriale commune » pour tenir compte de la situation des personnes éloignées de l’emploi, des contraintes imposées aux entreprises, et favoriser le pluralisme et la diversité des recrutements. La démarche s’inscrit dans la feuille de route « Strasbourg éco 2020 », projet de développement économique, qui comporte un important volet consacrée à l’économie sociale et solidaire, explique en substance Chantal Augé, adjointe au maire de Strasbourg chargée des marchés publics et président de la CAO.


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Combiner le 14 et le 53

« On a voulu faire le point sur le rôle de la ville et de la communauté urbaine dans la lutte contre le chômage et l’insertion par l’emploi. Quand la ville se développe, investit, il faut que ceux qui sont sur le bord de la route puissent en profiter. Dans ce cadre, la commande publique est naturellement un des leviers. » D’où l’idée de fédérer les énergies. A quoi servira le réseau ? « Il se réunira une fois par trimestre et il aura pour mission de diffuser les bonnes pratiques à l’ensemble de ses membres », poursuit l’élue. Les rencontres seront également l’opportunité d’innover en explorant toutes les facettes du Code, et de « croiser les analyses techniques avec les analyses sociales. » Si Strasbourg a décidé de lancer le mouvement, c’est que la cité alsacienne commence à avoir une certaine habitude de l’achat socialement responsable. Elle a franchi le Rubicon en 1994 - durant le mandat de Catherine Trautmann - à l’occasion du chantier du tramway. Depuis, les clauses sociales se sont multipliées, qu'il s’agisse du nettoyage des médiathèques, de la construction de l’équipement culturel du Neuhof ou de la requalification d’une route nationale en boulevard urbain (plus de 3800 heures de travail). Au 31 août 2010, la ville et la CUS ont déjà atteint 46 849 heures d’insertion, rien que pour leurs marchés de travaux en cours. Cependant, les deux collectivités veulent encore passer un cap, et parvenir à combiner l’article 14 (conditions d’exécution) et l’article 53 (critère d’attribution) du Code, histoire de bonifier les entreprises qui vont plus loin.

La réfection des bancs publics passée en article 30

Pour Chantal Augé, il y a aussi du grain à moudre avec deux outils insuffisamment exploités. Le premier est l’article 30, soit l’achat d’insertion. Pour l’instant, une expérience a été menée pour la réfection des bancs publics, activité qui ne nécessite pas une qualification importante et attribuée à un chantier d’insertion. Un tiers de la trentaine de personnes concernées est désormais dans un parcours durable de retour à l’emploi, assure l’adjointe au maire. Le second est l’article 15 (marchés réservés à des entreprises adaptées ou services d’aide par le travail), très peu utilisé, même si des lots ont été réservés lors de l’achat de produits d’entretien et de nettoyage. « On est débutant dans ce domaine », confesse Chantal Augé. Elle reconnaît volontiers l’existence de plusieurs blocages que les élus doivent lever. « Il y a une méconnaissance du Code sur les clauses sociales. Et des habitudes de travail à changer dans les administrations. A nous de convaincre les 250 acheteurs répartis dans tous les services qu’il faut identifier des segments d’achat éligibles aux clauses, rechercher des lots adaptés aux chantiers d’insertion comme la déconstruction ou le nettoyage de chantiers. » Il faut dire que les praticiens de la commande publique ont déjà pas mal de chats à fouetter. Mais Strasbourg a la chance d’avoir sur son territoire pas mal d’entreprises d’insertion. Et la ville peut compter sur le facilitateur « Relais emploi » interface entre les donneurs d’ordre, les entreprises et les publics potentiels. « On va leur ouvrir plus largement nos portes pour qu’ils nous aident à mieux dimensionner nos clauses. »

(1) : charte des acheteurs socialement responsables Charte des acheteurs socialement responsables (21.99 kB)