Coup de théâtre : la clause d'interprétariat validée
Une fois n’est pas coutume, le Conseil d’Etat n’a pas suivi les conclusions du rapporteur public qui estimait que la clause d’interprétariat, variante de la clause Molière, imaginée par la région Pays de Loire allait à l’encontre de la libre circulation au sein de l’Union. Comme le TA de Nantes, les sages du Palais Royal ont donc admis qu’un pouvoir adjudicateur puisse obliger le titulaire d’un marché à recourir à un interprète qualifié si les travailleurs d’un chantier ne disposent pas d’une maîtrise suffisante de la langue française pour leur permettre de comprendre la réglementation sociale en application du Code du travail.
Une clause non discriminatoire
Le Conseil d’Etat est resté de marbre à cette argumentation. Primo, les travailleurs détachés sont soumis à la règlementation nationale notamment en matière de santé et de sécurité au travail et de protection sociale, rappelle la juridiction de cassation. Deuzio, une entreprise, quelle que soit sa nationalité, ne serait pas lésée ou privilégiée. Cette stipulation ne porterait aucune atteinte au principe européen. Par ailleurs, une mesure nationale restreignant l’exercice des libertés fondamentales garanties par le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne peut être admise, rappelle la haute juridiction. La mesure doit à la fois poursuivre un objectif d’intérêt général et permettre de garantir la réalisation de celui-ci sans aller au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre. La clause d’interprétariat, mise en cause, respecte ces conditions selon les sages du Palais Royal : « elle vise à permettre au maître d’ouvrage de s’assurer, en vertu notamment de l’article L. 4531-1 du code du travail, que chaque travailleur directement concerné par l’exécution de tâches risquées sur le chantier est en mesure de réaliser celles-ci dans des conditions de sécurité suffisantes ». Toutefois, cette ambition de compréhension des consignes de sécurité est-elle compatible avec l’article 38 de l’ordonnance relative aux marchés publics ? Le texte encourage la prise en compte de considérations relatives au domaine sociale et à l’emploi. Gilles Pellissier écartait cette clause pour deux raisons : cet objectif est déjà encadré par le code du travail et cette législation est applicable à l’ensemble des chantiers. Pour le Conseil d’Etat, un tel dispositif n’est visiblement pas antinomique. Les Sages ont également écarté un dernier argument du rapporteur public qui avançait que des résultats similaires pouvaient être produits avec un coût moindre pour le prestataire. L’application de ces clauses doivent être appliquées sans occasionner de coûts excessifs, insiste le Conseil d’Etat.
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