
Référé précontractuel : la notification par le greffe, c’est possible
Le Conseil d'Etat vient d'admettre la recevabilité d'un référé contractuel, alors même que la personne publique a été informée, non par le requérant, mais par le greffe du TA. Selon Maître Michaël Karpenschif, avocat associé au cabinet Bureau Francis Lefebvre, les sages du Palais_Royal ont eu, dans cette affaire, une interprétation bien singulière de l'article R.551-1 du CJA.

Un pas en avant, deux pas en arrière. En septembre 2011, le Conseil d’Etat, dans son arrêt commune de Maizières-Lès-Metz, a fermé la passerelle entre référé précontractuel et référé contractuel, faute pour le requérant d’avoir notifié son recours précontractuel à la personne publique, comme le lui impose l’article R.551-1 du code de justice administrative (CJA). L’avertissement donné aux sociétés requérantes est clair : soyez diligentes, informez le pouvoir adjudicateur, sinon tant pis pour vous… (1). Début mars, il a admis la recevabilité d’un référé contractuel, alors même que la personne publique avait été informée du recours non par le requérant lui-même, mais par un fax du greffe du tribunal administratif. Le Conseil d’Etat estime que les dispositions de l’article L.551-14 du CJA ne peuvent trouver à s’appliquer lorsque le référé contractuel, présenté par un demandeur qui avait antérieurement déposé un référé précontractuel, est dirigé contre un marché signé durant la suspension prévue à l’article L.551-4 alors que le pouvoir adjudicateur était dans l’ignorance du référé précontractuel. Il en va toutefois différemment quand, informé de l'existence du recours non par le réquérant mais par le greffe du TA, le pouvoir adjudicateur a signé le marché. En l’espèce, le référé précontractuel présenté par la société DRI a été communiqué par le greffe du tribunal administratif de Lyon à l’OPAC du Rhône le 1er décembre 2011. « Qu’en signant le marché le 2 décembre 2011 alors qu’il ne pouvait ignorer la saisine du tribunal administratif, l’OPAC a méconnu l’obligation de suspension découlant de l’article L.551-4 du code de justice administrative ; que par suite, contrairement à ce qu’il soutient, la société DRI est recevable à saisir le juge du référé contractuel », juge le Conseil d’Etat.
Une interprétation erronée du CJA
Pour maître Michaël Karpenschif, avocat associé au cabinet Bureau Francis Lefebvre, cette solution est contraire à la lettre de l’article R.551-1 du CJA. « Je ne comprends pas comment on peut avoir une telle interprétation des dispositions du code de justice administrative. Cette obligation pour le requérant de notifier son recours à la personne publique a été introduite par l’ordonnance du 27 novembre 2009. Or là, le Conseil d’Etat admet que le greffe du TA puisse se substituer au requérant. Il suffirait donc désormais que le pouvoir adjudicateur soit informé de l’introduction du recours, peu importe la manière, pour déclencher la suspension de la signature…», observe l’avocat. En outre, en première instance, le TA de Lyon, après avoir admis le référé contractuel, n’a constaté aucun manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence. Toutefois, pour avoir méconnu la suspension de la signature du contrat prévue à l’article L.551-4 du CJA, le juge a infligé à l’OPAC du Rhône une sanction financière de 20.000 euros (2). Le Conseil d’Etat a réduit, dans son arrêt, le montant de la pénalité à 10.000 euros, alors que le rapporteur public, Bertrand Dacosta, dans ses conclusions, a proposé une somme de 5.000 euros. « Pourquoi 10.000, 20.000, on ne sait pas comment est calculé le montant, s’interroge Michaël Karpenschif. En outre, aucun manquement aux règles de publicité et de mise en concurrence n’ayant été commis, l’entreprise n’a subi aucun préjudice. Le fondement juridique permettant d’infliger au pouvoir adjudicateur une pénalité financière au bénéfice du Trésor Public est donc contestable à plus d’un titre ».
CE, 1er mars 2012, OPAC du Rhône, 355560
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