La lettre d'achatpublic.info n°427

  • 26/10/2012
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Mercredi, je suis allé au cinéma, voir « Permis d'attribuer », un film d'auteur à petit budget diffusé simplement dans une dizaine de salles « art et essai ». Le scenario est un peu emberlificoté et la mise en scène ne casse pas des briques, mais on passe toutefois un bon moment. C'est l'histoire de Triple Zéro Sept, acheteur des services secrets, la crème de la crème, surentraîné, titulaire du DESMA et d'un master 2 de droit public des affaires, capable de décomposer les coûts dans 467 familles d'achats et de traduire instantanément en maltais ou en syldave n'importe quel cahier des charges. Son chef, « M », lui confie une mission - nom de code les MAPA sont éternels - : mener à bon port la passation d'un marché (névralgique pour les démocraties occidentales) que cherche à couler à tout prix une organisation clandestine de soumissionnaires dénommée RER (ras-le-bol d'être rejetés) dont le quartier général se situe dans une base souterraine ultrasecrète. Muni d'un équipement de dernier cri et des trois dernières fiches techniques de la DAJ (lire notre info), l'expert est déposé par un sous-marin sur les rivages de la Côte d'Azur et combat à mains nues ( !) un nouveau cas de référé contractuel, ouvert lorsque l'entreprise écartée n'a pas été destinataire, sur fondement de l'article 80 du CMP, de motifs pertinents (lire notre article). Alors qu'il dilapide son maigre traitement de fonctionnaire au Casino Royale, « M » lui demande alors de pousser jusqu'à Hyères récupérer un précieux document, le « passeport multi-pass » destiné à faciliter l'accès des opérateurs économiques aux marchés de la ville et récompensé aux Trophées de la commande publique 2012 (lire notre article). Pas question de souffler : un hélicoptère le transporte en Alsace et le parachute dans la capitale du Bas-Rhin où il doit s'emparer du système de contrôle de ses marchés à quatre niveaux de la ville et de la communauté urbaine. Une fois la besogne accomplie, il envoie un SMS à « M » : bons baisers de Strasbourg (lire notre article). Toujours tiré à quatre épingles et jamais décoiffé, l'agent spécial saute ensuite dans son Aston-Martin bourrée de gadgets sophistiqués (radar de détection des OAB dans le capot, système de lancement des clauses sociales dans les phares avant) et roule à tombeau ouvert jusqu'au Conseil d'Etat. L'heure est grave. Alors qu'aucune disposition du Code ne met à la charge des personnes publiques la vérification des informations fournies par le candidat, les sages du Palais-Royal ont jugé qu'un pouvoir adjudicateur devait, sous peine de commettre un manquement, contrôler l'exactitude des déclarations relatives aux capacités financières et professionnelles (lire notre invité du jeudi). Bon allez, j'en ai assez d'écrire un édito rien que pour vos yeux. Le temps d'aller enfiler un smocking et rendez-vous au Harry's Bar afin de siroter une vodka-martini, attention mélangée au shaker, pas à la cuillère. A la semaine prochaine, peut-être…



Jean-Marc Binot (Eurobond)