
L’acheteur doit-il expliquer la méthode de notation lorsqu’il rejette une offre ?
Cet article fait partie du dossier :
Eviction du candidat
La portée de l’obligation de motiver le rejet d’une offre a été précisée par la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) dans un récent arrêt. L’acheteur n’avait pas communiqué aux candidats évincés, après une demande écrite, le mode de calcul et la ventilation détaillée des points attribués en fonction des différents sous-critères.

La Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) a précisé, dans un arrêt du 3 mai 2018, les attentes derrière le devoir, incombant aux acheteurs, de motiver le rejet d’un pli. La règle issue du règlement relatif aux règles financières applicables au budget général de l’UE est la suivante : « Le pouvoir adjudicateur communique à tout soumissionnaire… qui en fait la demande par écrit, les caractéristiques et les avantages relatifs de l'offre retenue ainsi que le nom de l'attributaire ». Ce contentieux a conduit à s’interroger sur les limites de cette obligation, c’est-à-dire sur les éléments devant être divulgués. En l’espèce, l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) avait lancé, en 2011, un appel d’offre portant sur un accord-cadre de services informatiques. Les sociétés European Dynamics n’étaient pas dans le haut du panier. Lesdites entreprises, sollicitant des explications, avaient obtenu un extrait du rapport d’analyse comportant d’une part une évaluation qualitative de leurs propositions au regard des critères et sous-critères utilisés – et d’autre part mentionnant leurs notes et celles des attributaires avant et après pondération. Cependant, l’acheteur n’avait pas transmis le mode de calcul et la ventilation détaillée des points attribués en fonction des différents sous-critères. Les sociétés avaient alors saisi le Tribunal de l’UE, à juste titre, en soulignant notamment un défaut d’obligation de motivation. A contrario, comme l’EUIPO ne voyait pas dans le règlement précité d’obligation de fournir un aperçu aussi détaillé, l’organisme s’est pourvu contre l’arrêt.
L’Office se prévaut de la jurisprudence Evropaïki Dynamiki / Commission où la CJUE avait déclaré qu' « il ne saurait être exigé de la Commission qu’elle transmette à un soumissionnaire dont l’offre n’a pas été retenue, outre les motifs du rejet de cette dernière, un résumé minutieux de la manière dont chaque détail de son offre a été pris en compte au titre de l’évaluation de celle-ci » (CJUE, 29 novembre 2011, affaire C‑235/11 P). L’avocat général Paolo Mengozzi avait reconnu également, dans ses conclusions, que le pouvoir adjudicateur n’était pas contraint de fournir la totalité du rapport. D’autant que le texte européen fixe cette ligne rouge : « la communication de certains éléments peut être omise dans les cas où elle ferait obstacle à l'application des lois, serait contraire à l'intérêt public, porterait préjudice aux intérêts commerciaux légitimes d'entreprises publiques ou privées ou pourrait nuire à une concurrence loyale entre celles-ci ». De son côté, le Tribunal a opté pour le raisonnement suivant : l’acheteur est libre d’établir la méthode de notation mais il serait tenu d’apporter, lors de contentieux, les éléments nécessaires au juge de l’UE afin qu’il puisse vérifier la légalité de l’appréciation. Dans la présente affaire, la non transmission des éléments demandés par les candidats (qui plus est ne rentrant pas dans l’une des hypothèses énoncées ci-dessus), ne permettait pas ni de comprendre le calcul et la ventilation, ni de constater si les appréciations étaient justifiées, a considéré la juge.
L’avocat général va aller dans le sens de la juridiction, en se fondant sur l’article 296 du traité sur le fonctionnement de l’UE. « La motivation… doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle » a admis ce dernier. Or, comme l’a expliqué le Tribunal, la communication des points nets s’avèrerait essentiel puisque la formule de notation choisie a pour conséquence de faire augmenter le nombre de points bruts attribué. « Lorsque le pouvoir adjudicateur rattache des évaluations spécifiques… qui sont manifestement pertinents pour la notation globale de ladite offre, le devoir de motivation englobe nécessairement le besoin d’expliquer la façon dont, notamment, les évaluations négatives ont donné lieu à la déduction de points » a conclu le juge de première instance. Paolo Mengozzi est même revenu sur l’arrêt Evropaïki Dynamiki en rappelant que parmi les informations envoyées par la Commission, il était possible de déduire le nombre de points obtenus.La CJUE a suivi, sans surprise, la position du Tribunal et de l’avocat général. Elle a même déclaré que « dans le cas où les documents du marché contiennent des poids chiffrés spécifiques attachés aux critères ou aux sous-critères, le principe de transparence exige qu’une évaluation chiffrée soit accordée à ces critères ou sous-critères ». En revanche, la Cour de justice n’a pas admis, contrairement au juge de première instance, la perte de chance sérieuse mis en avant par l’une des sociétés, dans son moyen invoquant une erreur manifeste d’appréciation de sa proposition.
Pas de contrainte de fournir la totalité du rapport d’analyse
L’Office se prévaut de la jurisprudence Evropaïki Dynamiki / Commission où la CJUE avait déclaré qu' « il ne saurait être exigé de la Commission qu’elle transmette à un soumissionnaire dont l’offre n’a pas été retenue, outre les motifs du rejet de cette dernière, un résumé minutieux de la manière dont chaque détail de son offre a été pris en compte au titre de l’évaluation de celle-ci » (CJUE, 29 novembre 2011, affaire C‑235/11 P). L’avocat général Paolo Mengozzi avait reconnu également, dans ses conclusions, que le pouvoir adjudicateur n’était pas contraint de fournir la totalité du rapport. D’autant que le texte européen fixe cette ligne rouge : « la communication de certains éléments peut être omise dans les cas où elle ferait obstacle à l'application des lois, serait contraire à l'intérêt public, porterait préjudice aux intérêts commerciaux légitimes d'entreprises publiques ou privées ou pourrait nuire à une concurrence loyale entre celles-ci ». De son côté, le Tribunal a opté pour le raisonnement suivant : l’acheteur est libre d’établir la méthode de notation mais il serait tenu d’apporter, lors de contentieux, les éléments nécessaires au juge de l’UE afin qu’il puisse vérifier la légalité de l’appréciation. Dans la présente affaire, la non transmission des éléments demandés par les candidats (qui plus est ne rentrant pas dans l’une des hypothèses énoncées ci-dessus), ne permettait pas ni de comprendre le calcul et la ventilation, ni de constater si les appréciations étaient justifiées, a considéré la juge.
Faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement
L’avocat général va aller dans le sens de la juridiction, en se fondant sur l’article 296 du traité sur le fonctionnement de l’UE. « La motivation… doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle » a admis ce dernier. Or, comme l’a expliqué le Tribunal, la communication des points nets s’avèrerait essentiel puisque la formule de notation choisie a pour conséquence de faire augmenter le nombre de points bruts attribué. « Lorsque le pouvoir adjudicateur rattache des évaluations spécifiques… qui sont manifestement pertinents pour la notation globale de ladite offre, le devoir de motivation englobe nécessairement le besoin d’expliquer la façon dont, notamment, les évaluations négatives ont donné lieu à la déduction de points » a conclu le juge de première instance. Paolo Mengozzi est même revenu sur l’arrêt Evropaïki Dynamiki en rappelant que parmi les informations envoyées par la Commission, il était possible de déduire le nombre de points obtenus.La CJUE a suivi, sans surprise, la position du Tribunal et de l’avocat général. Elle a même déclaré que « dans le cas où les documents du marché contiennent des poids chiffrés spécifiques attachés aux critères ou aux sous-critères, le principe de transparence exige qu’une évaluation chiffrée soit accordée à ces critères ou sous-critères ». En revanche, la Cour de justice n’a pas admis, contrairement au juge de première instance, la perte de chance sérieuse mis en avant par l’une des sociétés, dans son moyen invoquant une erreur manifeste d’appréciation de sa proposition.


Envoyer à un collègue
Offres d’emploi
Chargé de la commande publique (f/h)
- 28/05/2025
- Ville de Bouc Bel Air
Gestionnaire marchés publics (f/h)
- 27/05/2025
- Communauté de communes du Pays d'Ancenis
Gestionnaire de la commande publique (f/h)
- 26/05/2025
- Communauté de Communes du Bassin d'Aubenas
Nouveaux documents
TA Toulouse 17 avril 2025 Société FXC Europe
-
Article réservé aux abonnés
- 05/06/25
- 07h06
TA Orléans 16 avril 2025 Société Colas France
-
Article réservé aux abonnés
- 04/06/25
- 07h06
TA Lille 18 avril 2025 Société DEMOLAF
-
Article réservé aux abonnés
- 03/06/25
- 07h06
Les plus lus
Achat durable : les “goodies”, côté obscur des Spasers
-
Article réservé aux abonnés
- 02/06/25 06h06
- Jean-François Gazon
L’utilisation de l’IAG dans la sélection des offres : des zones de réticence
-
Article réservé aux abonnés
- 05/06/25 06h06
- Johanna Granat
-
Article réservé aux abonnés
- 04/06/25
- 06h06
Marché public et évaluation des offres : un cas pratique sanctionné par le juge
-
Article réservé aux abonnés
- 02/06/25
- 06h06
Respect du planning dans un marché de travaux : un critère de jugement des offres critiquable
-
Article réservé aux abonnés
- 03/06/25
- 06h06